fr GUERIR LE MAL D'AIMER PAR LE RIRE DANS LES TRAITES MEDICO-MORAUX DE L’ERE BAROQUE : HILARITE PURGATIVE, ANTIDOTE ANECDOTIQUE, RIS PHILOSOPHIQUE
  • GORICHON-HERREN,  Alexandra
    Département de français - Université de Fribourg
Abstract

In the early modern medical treatises, laughter and tears are both responses to lovesickness. These strong emotional reactions are conceptualized as a cathartic therapy, especially the laughter. In spite of its power of seduction and its representation as devil’s tricks, the laughter proves its therapeutic efficacy. The healing laugher appeases and puts the insane love in perspective. It purges body and soul by eliminating the bad humor. The therapeutic laughter is based on the therapeutic coitus. This therapy evacuates the retained seed becoming burned vapors into the brain. With this mind, the laughter, located in the lower abdomen by the ancient medicine, increases the body temperature and shakes the whole body to purify the blood. This somatic tremor finds its metaphorical extension into the performativity of narration. Because of its dramaturgy, the anecdote becomes a catharsis for the soul. It allows the unusual of stories and the sensation of the strong emotion that frees from sex drives. So, the anecdote is an antidote. It gives the result that the medical speech, artefact of the practicing ataraxia, uses the irony in order to be wiser and soberer.

Abstract

Dans les traités médico-moraux de l’ère baroque, le rire, au même titre que les larmes, est considéré comme une thérapeutique cathartique à l’amour en souffrance et aux maux qu’il provoque. Malgré son ambiguïté, puisqu’à la fois défini en tant qu’arme de séduction et ruse du diable, ce rire n’en est pas moins un modérateur opératoire pour assainir la passion malade et la mettre à distance de soi. Il devient curatif par sa fonction à purger matériellement l’âme et le corps ; il ôte l’humeur mauvaise que le corps recèle et qui déséquilibre l’ensemble de l’organisme. Le rire thérapeutique est un calque de la cure par le coït qui permet de s’alléger des fluides séminaux, menaçant de dégénérer en vapeurs suffocantes dans le cerveau. Le rire, qui, selon les théories médicales de l’époque, se loge dans la rate, permet, en effet, par un processus de réchauffement interne et d’agitation du corps qu’il génère, de purifier le sang de la lie néfaste. Ce tremblement somatique trouve son prolongement métaphorique dans la fonction épuratrice de l’anecdote et des enjeux dramaturgiques qu’elle sous-tend. Jouant sur la stupéfaction qu’elle crée devant l’insolite rapporté et le sensationnalisme de l’émotion forte, l’anecdote devient antidote à une âme qui se libère de ses pulsions. Il en ressort que le discours médical, artefact d’une philosophie ataraxique, emploie l’ironie pour mieux apprendre à être sage.