Abstract
Depuis son premier roman intitulé Extension du domaine de la lutte (1994), Michel Houellebecq continue à être le sujet de vifs débats littéraires. Aussi son dernier roman portant le titre de Soumission, paru au début de janvier 2015, a-t-il provoqué une polémique multiforme allant du politico-social au politico-littéraire aussi bien dans la presse française que dans celle du monde occidental. À l’origine de ces débats, il y a, sans aucun doute, la curieuse coïncidence entre l’attaque meurtrière des djihadistes contre les artistes de Charlie Hebdo et la parution de Soumission dont le sujet d’anticipation porte sur l’arrivée au pouvoir d’un parti politique pro islamique en France dans la présidentielle de 2022. En dépit de son caractère d’anticipation, Soumission est un roman qui présente plusieurs niveaux de lecture dont chacune est construite sur un discours romanesque différent. Au premier niveau que nous pourrions qualifier d’« axe de la rétrospection littéraire», puisque le thème dominant traite de l’itinéraire littéraire de Joris-Karl Huysmans, nous trouvons un discours sur la critique littéraire. Dans le second, que nous appellerions « axe de la prospection politico-sociale », nous avons affaire à un discours sur la montée de l’islam en France. Entre ces deux niveaux qui se déplacent en avant ou en arrière sur une ligne horizontale, il y a encore deux niveaux de lecture dont l’un est caractérisé par la simultanéité de l’écoulement des évènements saisis par les discours quotidiens des personnages à sujets variés et l’autre est marqué par le monologue du personnage principal qui se compose majoritairement de discours pornographiques. Ces deux derniers niveaux s’installent sur un « axe vertical » qui se déplace parfois en profondeur, parfois en surface. Ce travail a pour objectif d’analyser le contenu discursif de Soumission dans une perspective du discours romanesque.