fr AUTOREPRÉSENTATION IRONIQUE DANS LES ROMANS FRANÇAIS DE MILAN KUNDERA
  • Payard,  Pascaline
Abstract
Dans l’œuvre romanesque française de Kundera, les arcanes des diverses instances énonciatives (auteur, narrateur, lecteur, personnages) égarent jusqu’aux définitions mêmes de celles-ci. Les personnages gagnent ainsi en mobilité et en flexibilité au sein d’un espace textuel narratif mouvant. Ce jeu habile des masques, reflet de devenirs virtuels du monde actuel, est mené sous la gouverne d’une ironie  qui rend fragile sinon impossible le saisissement de ces identités postmodernes. Mais paradoxalement, de quelle puissance génératrice découlent de telles identités, de quelle « matrice » ? Au même titre que l’écriture métaphorique ou cryptée, Kundera fait de l’ironie un masque qui dissimule une identité qui se veut insaisissable. Si l’ironie reste son procédé le plus éloquent, c’est bien que le regard porté sur l’être humain par cet auteur est empreint de la vacuité même de la quête et peut-être de la reconnaissance de soi. Les identités d’auteur, de personnage, de lecteur, semblent pourtant relever d’un même individu et ce jeu de chaises musicales ouvre à un nombre infini d’expériences des réalités. Entre veilles et rêves, entre authentique et faux, le reflet d’un soi multiple, plus que d’un moi unique, se parle tant par la contextualisation historique de L’ignorance, que par la présence fugace et inattendue de l’épouse de l’auteur dans La lenteur ou encore, par l’occurrence des apostrophes du narrateur au lecteur ou aux personnages. Les uns n’excluent pas les autres et ainsi de suite, ce qui ne manque pas de provoquer un effet d’enchâssement contribuant à la complexification de la représentation de l’écrivain. Kundera parvient cependant à se présentifier en tant que puissance unique, déjà attestée par ses exigences impérieuses de traducteur. Qu'est-ce que, ou est-ce encore se représenter, que se représenter en ironiste suprême ?
Abstract
Kundera’s French novels often blur the delimitation of the several voices of the text (author, narrator, reader, characters) because of the evasiveness of their criteria. The characters thus display more mobility and flexibility in a shifting narrative textual space. This clever game of masks (a reflection of virtual evolutions of our present world), is handled by a masterly irony which reduces possibilities of getting a hold on these ultra-modern identities. But, paradoxically, such identities must originate in some in some powerful, highly productive matrix. As some writers would use metaphor or cryptic writing, Kundera’s irony places a mask over an identity that purports to remain unreachable. The reason why irony is always Kundera’s most eloquent device might well be that this author’s vision of the human condition is branded with the purposelessness of the quest for the self, if not even the vanity of accepting its existence. Nevertheless, surprisingly, the diverse identities of author, reader and character seem to be rooted in a single individual. This game of musical chairs is open to an unlimited number of experiments with reality. Between dreams and waking state, between truth and falsification, pictures of a multiple self are offered rather than the unique image of an ego. However “Kundera” still settles in the site of authority, as he did with regards to the translations of his works. What is it then to represent oneself in such a way, do you still represent yourself at all when you do it as the supreme ironist?